Crédit aux PME :
 des mesures ciblées pour des difficultés ciblées

Depuis le début de la crise, les défaillances d’entreprises ont bondi de 25%. Cette situation est‐elle causée par des difficultés d’accès au financement dans un contexte où les banques doivent s’ajuster à de nouvelles exigences prudentielles, souvent perçues comme un risque de restriction supplémentaire ?


Dans la nouvelle Note du Conseil d’analyse économique, Jacques Cailloux (1), Augustin Landier (2) et Guillaume Plantin (3) dressent un état des lieux du financement des PME et TPE dans ce nouveau paysage bancaire. Les difficultés qu’ils mettent au jour sont ciblées : elles touchent davantage les petites que les grandes entreprises, concernent les financements de trésorerie plutôt que d’investissement, et ne sont pas sans lien avec l’allongement observé des délais de paiement. Considérant que les banques françaises devraient être en mesure d’absorber une remontée de la demande de crédit de la part des petites entreprises françaises, les auteurs concentrent leurs recommandations sur les manières de surmonter les asymétries de taille et d’information qui handicapent ces entreprises aussi bien dans le respect des délais de paiement que dans l’accès au crédit.

Dans un contexte de crise, les auteurs rappellent que l’accroissement constaté des défaillances d’entreprises est davantage dû à l’insuffisance de carnets de commande qu’à celle de l’accès au crédit bancaire. Le secteur bancaire serait‐il à même de répondre à une demande de crédit plus soutenue dans une conjoncture plus favorable ? La Note souligne qu’un point de croissance nominale supplémentaire conduirait à un accroissement de demande de crédit de 10 à 15 milliards d’euros, ce qui représente seulement 0,1 à 0,2% du bilan des banques. « Il s’agit donc d’un volume très réduit ; les banques disposent d’une capitalisation suffisante pour répondre à un redressement de demande de crédit des PME », indique Jacques Cailloux.

La diversification comme solution au financement des PME ?

La diversité des sources de financement en France est surtout l’apanage des grandes entreprises et ETI. Les PME et les TPE en France sont structurellement dépendantes du financement bancaire. Les initiatives récentes pour diversifier les sources de financement concernent essentiellement les ETI et les grosses PME, le placement privé de la dette des entreprises ne pouvant guère s’adresser aux plus petites entreprises du fait de coûts fixes élevés. Faut‐il développer d’autres sources de financement pour les petites entreprises via, par exemple, un marché de prêts titrisés ? « L’hétérogénéité de la population des petites entreprises, les clauses spécifiques des prêts se prêtent mal à l’analyse statistique pour construire des supports de titrisation et il faut en outre souligner le problème important d’asymétrie d’information entre les emprunteurs et le marché. Cela nous conduit à ne pas recommander cette voie pour la France », déclare Guillaume Plantin.
Proposition 1. Le développement de la titrisation devrait cibler les prêts aux particuliers, grandes PME et ETI plutôt que les petites PME et TPE.

Le besoin de trésorerie des PME

Si on ne relève pas de problème majeur d’accès aux crédits pour les PME, il reste des difficultés récurrentes pour les crédits de trésorerie. Ainsi, seules près de 75 % des PME obtiennent en totalité (ou à plus de 75 %) leur crédit de trésorerie selon une enquête de la Banque de France. Les TPE sont prises en ciseaux entre l’accroissement des délais de paiement constaté depuis 2011 et la contraction de la demande. Si une meilleure application de la loi sur les délais de paiement et le renforcement des sanctions en cas de retard contribuent à améliorer les choses, on peut également penser à des solutions contractuelles permettant d’assurer le risque de retard de paiement via l’affacturage inversé où le client de l’affactureur est le donneur d’ordres et non plus le fournisseur.
Proposition 2. Inciter les pouvoirs publics au développement de l’affacturage inversé afin d’assurer les PME contre le risque de délais de paiement excessifs de leurs grands donneurs d’ordres.

Information financière et partage des données de l’entreprise

La production privée d’informations peut se révéler sous‐optimale quand le producteur en supporte seul le coût sans s’en approprier les rendements. C’est pourquoi l’idée de fluidifier et standardiser l’information relative au risque des entreprises sans donner un avantage informationnel à telle ou telle catégorie d’acteurs, faciliterait l’émergence d’un marché secondaire des prêts et l’innovation sur ce marché. En open data ou moyennant finance, l’accès plus large aux données FIBEN produites par la Banque de France est une piste naturelle pour progresser dans cette direction.
Proposition 3. Élargir l’accès aux données FIBEN à l’ensemble des acteurs économiques.

La mauvaise anticipation des besoins de trésorerie ou de capitaux propres est un facteur d’échec entrepreneurial

Pour mieux accompagner les emprunteurs, il est crucial de renforcer les connaissances financières de base des chefs d’entreprise, en s’appuyant sur les possibilités offertes par les formations en ligne.
Proposition 4. Développer un outil de formation pour préparer le dirigeant de TPE aux problématiques financières et comptables de base. Cette formation pourrait être validée par un examen en ligne et les banques participantes pourraient offrir (en toute transparence) un traitement favorable aux entrepreneurs qui participent au programme.

Pour ce qui est des TPE sous le seuil des 750 000 euros de chiffre d’affaires, qui ne figurent pas dans le fichier FIBEN, l’octroi de crédit s’appuie moins sur l’analyse financière que sur une information fine sur le dynamisme et le comportement du dirigeant. « L’établissement d’un fichier du type « FICO score » qui évalue la capacité de remboursement de l’individu sur la base de son historique de crédit pourrait sécuriser et standardiser l’octroi de prêts aux TPE », avance Augustin Landier.
Proposition 5. Le développement d’un « fichier positif » du crédit des individus (sur le modèle du FICO américain) permettrait de desserrer la contrainte de crédit des TPE sans historique ni collatéral.

Retrouvez les Notes du CAE sur cae‐eco.fr

A propos du Conseil d’analyse économique
Placé auprès Premier ministre, Le Conseil économique a pour mission d’ « éclairer, par la confrontation des points de vue et des analyses, les choix du gouvernement en matière économique ». Il est composé d’économistes universitaires et de chercheurs reconnus et réalise en toute indépendance ses qu’il rend publics. Les opinions exprimées sont celles de leurs auteurs et n’engagent ni le Conseil, ni le président délégué, ni bien entendu le Premier ministre.

(1) Nomura International, correspondant du CAE.

(2) École d’économie de Toulouse (TSE), Université de Toulouse 1, IDEI.
(3) Sciences Po Paris, membre du CAE.


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Jeudi 4 Décembre 2014


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